Julie Masse est une chanteuse qui fait éclater son talent, comme un feu d'artifice. Mais lorsque le rideau tombe, elle redevient la femme et l'enfant qu'elle ne veut jamais cesser d'être. Un être paradoxal, fait de rêverie, de jeux, de sensibilité et de logique implacable!
Par Marthe Léonard
Vous avez 20 ans, comment vous définissez-vous?
Je crois que je suis une femme-enfant et j'espère demeurer enfant toute ma vie. Je ne suis pas une intellectuelle, mais pas du tout! Je n'aime pas tellement la lecture, sauf pour les histoires mystérieuses. Quant aux romans, je trouve ça trop excessif, impossible. Il faut croire que j'ai un esprit logique. Cependant, j'aime jouer, écouter des vidéos de Walt Disney... puis, comme vous le savez, j'aime manger, passionnément!
Vous ne vous souciez donc pas de votre ligne?
Pas du tout. Je n'ai jamais fait attention à mon corps. Je grimpe partout, je me fais des bleus, je mange quantité de desserts. Heureusement que j'ai la chance de ne pas engraisser facilement!
Il en a toujours été ainsi?
Non. Plus jeune, j'étais une enfant étoudissante et ma mère me trouvait des activités dans lesquelles je pouvais dépenser mon énergie débordante. J'ai donc suivi des cours de gymnastique. Mais j'étais maigre à faire peur! Tout le monde me le disait et je n'aimais pas ça. Ma soeur avait déjà des seins, mais moi, ça m'a pris du temps pour avoir un corps de femme. J'étais complexée, la gymnastique me musclait mais j'avais une piètre apparence et ma soeur se moquait de mon gros ventre!
Quelle importance accordez-vous à la mode?
Durant mon adolescence, j'ai bien essayé de me crêper les cheveux pour suivre le courant punk, mais c'était un vrai désastre. Aujourd'hui, j'adore la mode. Les vêtements que je porte doivent caresser ma peau. Je me soucie des tissus - que je préfère soyeux -, de ma peau, de mon look.
Dans le milieu artistique, c'est important, selon vous?
Ce qui est important, c'est de dégager quelque chose d'attirant, un certain charisme, du charme. Beaucoup d'artistes d'aujourd'hui ont cette beauté. On pourrait tomber en amour avec tous les gars du milieu tellement ils dégagent ce petit quelque chose d'excitant!
Parlez-nous de l'amour...
J'ai vécu ma première véritable peine d'amour à l'âge de 14 ans. Ça faisait 11 mois que je sortais avec mon chum, mais il m'a laissée tomber pour sa "gang". Heureusement que j'oublie vite! Je suis une romantique qui a besoin d'être entourée. J'ai besoin d'avoir une relation avec quelqu'un, ça m'équilibre, ça me fait fonctionner. Je déteste littéralement la solitude. Un amoureux c'est quelqu'un qui nous écoute, nous sécurise, nous aide à pousser. C'est aussi un complice avec qui on peut discuter. Quelque chose que l'on vit en dehors de la carrière. Mais présentement, j'ai besoin des deux!
Que pensez-vous des jeunes d'aujourd'hui?
Je crois que nous cherchons l'idéal. Les jeunes ont vécu la période des divorces et ils ne veulent pas revivre ça. C'est peut-être la raison pour laquelle ils s'engagent si tôt dans l'amour. Ils cherchent la fidélité. Pour ma part, j'ai eu la chance d'avoir une famille unie. Je voudrais vivre toute ma vie avec la même personne. Sauf que pour cela, il faut que les deux veuillent être vraiment fidèles. Je crois que dans un couple, il faut évoluer ensemble, et non chacun de son côté. Je désire avoir deux ou trois enfants et je resterai volontiers à la maison pour les élever. Ou alors, il faudra que ce soit mon mari. Mais j'ai conscience que pour faire cela, ça prend de l'argent.
Est-ce que vous choisissez vos chansons en fonction d'un public jeune?
Oui. Je demande toujours que les textes rejoignent les idées des jeunes, que les chansons soient joyeuses et positives. Il est vrai qu'il faut que j'aie le coup de foudre pour une chanson. Ce fut le cas pour C'est zéro. Habituellement, nous choissisons les musiques, pour ensuite demander à un auteur d'y ajouter un texte.
Que pensez-vous des gens plus vieux?
Ils font aussi partie de mon public... et de la société dans laquelle nous vivons. Je dois dire que je suis très peureuse depuis quelques années et que j'ai besoin de me sentir en sécurité. Je ne me promène jamais seule et je verrouille toujours les portes de la maison. Quand j'étais petite, je ne voyais pas ça. En vieillissant, on voit tous les défauts de la société, tous les problèmes. C'est alors qu'on réalise qu'il faut se protéger, qu'il y a des difficultés à surmonter. Je crois que les gens ne communiquent pas assez. Nous, les jeunes, nous n'avons pas eu à livrer de grandes batailles pour acquérir des droits; ça s'est fait avant nous et on en profite. C'est comme si le problème hommes/femmes était réglé ou qu'il n'y en avait jamais eu.
Quel est le défaut qui vous agace le plus?
La mauvaise humeur et l'impatience. Hélas, ce sont souvent les hommes qui sont les moins patients. Ils veulent toujours aller vite. Il arrive que lorsqu'on leur demande un service, comme client, ils soient arrogants, et cela m'agace terriblement. Moi, j'aime les gens souriants, polis, ouverts et qui acceptent les autres comme ils sont.
Vous arrive-t-il de décrocher, de faire des folies, de vous laisser aller?
Peu souvent. Parce que je suis plus réservée que fonceuse. Je n'ai pas l'esprit aventurier. Lorsque je fais des petites folies, c'est à la maison, avec mon chum, ou avec mes parents. Un souper assise par terre dans le salon, une fête improvisée, des choses simples, comme visionner un bon film, jouer à des jeux de société ou rire comme des fous avec les gens que j'aime.
L'amitié est-elle importante dans votre vie?
Beaucoup. Je ne suis fait une nouvelle amie et elle travaille chez un traiteur. Nous parlons de tout, et évidemment de ma passion: la nourriture! Par contre, j'ai perdu un ami, et cela m'a fait très mal. Il est mort très jeune, frappé de plein fouet par une automobile.
Cette perte vous a-t-elle marquée?
Énormément. Je n'arrêtais pas de pleurer. Je me demandais pourquoi, mais pourquoi il était mort. Il était guitariste, et nous avions fait trois comédies musicales ensemble. Tout le monde l'aimait. C'était un gars plein de vie, qui donnait tout à tout le monde, un gars correct. J'ai eu un véritable choc en apprenant sa mort. Il était parti et je ne l'acceptais pas. Les autres me disaient qu'il avait fait ce qu'il avait à faire et que c'était le destin. Mais moi, j'étais révoltée. Depuis ce temps, j'ai appris à croire au destin. Il y a une raison pour laquelle on fait ce que l'on fait, pour laquelle on rencontre telle ou telle personne, pour laquelle on vit et on choisit de vivre de telle manière.
Y a-t-il d'autres talents artistiques dans votre famille?
Papa a une très belle voix et il chante à toutes les fêtes. Maman aurait aimé, plus jeune en faire un métier, mais son père est décédé très tôt; elle a donc dû aller travailler et mettre son rêve de côté. De plus, une de mes grand-mères est peintre.
Quels sont, selon vous, vos qualités et vos défauts?
J'ai souvent les défauts de mes qualités: par exemple, je suis intransigeante dans le métier. Je suis très gourmande tout en étant gourmet. Je suis curieuse. J'aime l'humour et jouer des tours, mais je suis trop ricaneuse, et je manque souvent mon coup en raison de cela. Je déteste être inoccupée et lorsque je ne travaille pas, il faut toujours que je me change les idées. J'ai peine à supporter les choses lourdes, les émotions des autres, car elles m'envahissent facilement. Je suis donc vulnérable sur ce point. Et je déteste être malade. De plus, je suis une fille très tenace. Quand je voulais quelque chose, plus jeune, je chiâlais tellement que j'avais mes parents à l'usure et que je finissais par l'obtenir. Mais je ne crois pas que je sois aussi têtue aujourd'hui.
Des projets pour l'avenir?
Je reviens d'Europe, où nous avons fait la promotion de C'est zéro. Présentement, je rentre préparer un troisième vidéoclip. Ensuite, je dois préparer un spectable pour l'été qui vient. Sans oublier un album que je compte bien sortir en octobre. Je serai donc très occupée. Quant à la carrière internationale, tous les artistes en rêvent. Mais moi, ça ne me tente pas de chanter en anglais. S'il y a carrière internationale, ce sera avec des chansons en français, j'y tiens beaucoup.
Le travail l'emporte donc sur l'extase dans votre vie...
L'extase, pour moi, c'est manger un cheese-cake. J'aurais fait une bonne grosse, car j'aime rire et manger. Je suis plutôt une fille qui s'émerveille. Je n'aime pas les bébelles, les grosses automobiles, les décors chargés. Chez moi, c'est simple. Mais j'aime le talent, l'intelligence, la créativité. Barbra Streisand, Francis Cabrel, Roch Voisine, Daniel Lavoie, Richard Séguin, Marina Orsini sont des artistes qui me fascinent; ils se donnent entièrement à ce qu'ils font. Il y a aussi Marie Carmen. Elle a su aller me chercher complètement durant un spectacle. Après la troisième chanson (Stone), j'ai failli me lever dans la salle et lui crier à quel point elle me faisait vibrer. J'avais la gorge serrée, les larmes aux yeux. Mais comme le public était froid, je n'ai pas osé. Les artistes, chanteurs et comédiens, surtout au Québec, sont en train de prouver qu'ils ont plus que du talent. Ils sont des créateurs qui transmettent aux autres leurs propres passions.
Être un artiste, un vrai, c'est ça!